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*** A l'âge de 14 ans, elle créera la surprise avec sa première exposition à Rabat au Maroc. Ses supports seront de bois, ils le resteront.Après le conservatoire d'art dramatique de Rabat et deux ans d'école du Louvre,elle expose au Maroc sous le haut patronage du ministre de la Culture. Dans les années soixante dix, elle est Productrice à la RTM à Rabat et journaliste à Maroc Soir.De retour en France, en 1990 le "Yan's Hôtel" met ses salons à sa disposition.En 1991,le Maire de Six-Fours lui ouvre les portes de la Maison du Patrimoine. *** arrêt sur image



Andrée RAYBAUD LE TRAIN
Extraits
Cette histoire vous paraîtra incroyable. Pourtant, je fus témoin de ce qui arriva…………..
Il faisait très chaud ce matin d’été, m’étant levée tôt, je décidai prendre le train de 8 heures 32………… Je constatai que nous étions nombreux à nous en être remis à la Compagnie des Chemins de Fer. Sur le quai encombré, des familles s’interpellaient, des parents énervés recomptaient sans cesse leurs bagages et leur progéniture : des gifles pleuvaient, des couples se chamaillaient, d’autres pleuraient qui se quittaient……………
Le train à peine arrêté beaucoup se ruèrent vers l’avant du train, pour ma part, je trouvai aisément une place assise dans le wagon de queue qui, vu l’influence, avait été rajouté : c’était une première classe, les secondes étaient bruyantes, quant aux troisièmes peu onéreuses, elles ne trouvaient guère preneur avec leurs banquettes en bois, fort inconfortables. Dans ce compartiment boudé par les voyageurs, nous n’étions que trois : un homme, la bonne cinquantaine qui ne cessait de s’éponger le cuir chevelu parsemé de touffes de cheveux agglutinés par la sueur et le visage couperosé par la trop bonne chair et la boisson……….Il ne prêtait aucune attention à ce qui l’entourait, son costume de toile claire devait sortir de chez un bon tailleur, mais atteint un certain poids, plus rien ne vous va : sur son ample bedaine son gilet tirait à chaque boutonnière et sur le bourrelet du ventre gras et les imposantes cuisses étalées sur les coussins de moleskine verte l’étoffe était prête à craquer . Une jeune femme nous faisait face, sans être vraiment jolie, elle avait un charme mystérieux, captivant. Sa magnifique chevelure rousse portée relevée, dénudait son long cou gracile emprisonné de deux rangées de perles dans lesquels s’entremêlaient des frisons, bien que son nez fût un peu fort, le visage était harmonieux,la peau diaphane,très pale, piquetée de taches de rousseur,révélait sur les tempes, le réseau bleuté des veines, la blancheur de sa toilette accentuait sa carnation laiteuse ce qui lui donnait un aspect de grande fragilité ………...Depuis son entrée dans la voiture, son attitude n’avait pas changé : ses longues mains croisées, reposaient sur un petit sac pochette, le soleil en jouant dans ses cheveux la coiffait d’un casque rutilant. La tête légèrement inclinée sur son épaule, yeux mis clos, elle paraissait plongée dans une profonde méditation : nous n’existions pas ! Quand enfin elle porta au loin son regard et que ses paupières frangés de longs cils dévoilèrent ses grands yeux verts, un instant nos regards se croisèrent, une secousse du train qui démarrait fit glisser un pan de sa jupe portefeuille, le galbe de sa cuisse gainée de soie dévoilée s’offrit à mon regard, d’un revers de main élégant elle rabattit l’étoffe et à nouveau elle fut absente. N’ayant aucune préoccupation majeur, je laissai mon esprit vagabonder, et fus surprise des voies improbables qu’il empruntait… engourdie par la chaleur et le ronron de la machine, je succombai à une douce torpeur et m’assoupis…………

Un choc me sortit brutalement du profond sommeil dans lequel, je m’étais alanguie. Le temps de reprendre mes esprits, et de réaliser que le train avait stoppé... tout le monde était aux fenêtres à s’enquérir auprès de ceux qui se trouvaient plus avant, des raisons de ce brusque arrêt.
Le mari, d’une femme très « Résidence », gantée et chapeauté malgré la chaleur, avait promptement sauté du train afin de s’accorder quelques instants de répit, sa femme étant de celles que l’on aimerait voir au diable !

- George que se passe-t-il ?...
- Et bien !... ma fois… je n’en sais rien !
- Mon ami !... vous ne savez jamais rien !... N’oubliez pas que nous sommes attendus !...
- Mais… oui je sais !… que voulez-vous que j’y fasse…ce n’est pas moi qui suis aux commandes de ce foutu train !...
- Soyez poli ! voulez-vous !
- Quelle idée avez-vous eu de prendre le train, si nous avions pris la voiture…
- Mon ami, si nous avions pris la voiture, nous aurions dû voyager avec votre mère !
- Alors cessez de vous plaindre… et allez vous rendre compte par vous-même !...
- Il ne manquerait plus que cela !
Furent les premiers mots que j’entendis qui perçaient le brouhaha.
La femme impatiente, héla un indigène :
- Eh !... Toi là-bas ?
- Si à moi qui ti parles ?...
- Oui… c’est à toi… Va donc voir ce qu’il se passe ?
- Moi… j’i veux pas di histoires !!!
- Imbécile !!!


Andrée RAYBAUD DE L'UNIVERS

LES MONDES PARALLÈLES (1988)
La multiplicité des mondes est infinie Ces mondes sont identiques mais avec des projections différentes de la même réalité, bien que distincts les uns des autres, ils se croisent se chevauchent sans jamais converger.

Ils forment un tout cohérent. A la fois différent et semblable, ils peuvent être présents ou absents, dans le présent, le passé, le futur. Ils ont des rythmes particuliers et peuvent se contracter ou se dilater sans pour autant changer.

Quand l’espace-temps se dilate des déchirures dans le continuum laissent entrevoir des espaces fragmentés de monde parallèles Alors le risque de voire des pages du passé qui sont celles du futur où se sont déroulés des événements définis comme étant ceux d’un présent vécu dans un passé identique au futur apparaissent.

Quand le sentiment d’un déjà vécu, est perçu par les hommes c’est que sans qu’il en soient conscients leurs cerveaux captent de mondes parallèles des évènements fixés dans le continuum

Bien que l’histoire se répète et génère des évènements identiques elle s’articulera de façon différente et s’inscrira dans l’espace-temps de manière à rester constante.
Quand un événement important de l’histoire de l’humanité se produit, il sera la résultante d’un passé projeté dans un futur mais vécu comme un présent. Ces événements évolueront dans le temps et resteront constants dans le passé, présent, futur, ces notions de temps ne peuvent exister dans les mondes intangibles.

Prenons comme suite apparemment logique à toute extinction la surpopulation du globe,

En découlera l’émergence de Nations tyrans qui ne préserveront pas l’équilibre dans le monde mais au contraire le maintiendront dans un état d’instabilité permanent

Ces nations tyrans perdurables seront fixées dans le continuum. A la disparition de l’humanité, redémarrera un nouveau cycle identique dans son présent à celui de son passé et de son futur. C’est dans le cycle de l’évolution que s’inscrivent les tyrans, ils reprendront la place qui était la leur, sans eux le monde ne peut évoluer :

C’est une constante de ce monde.




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Andrée RAYBAUD
QUI DU FLEUVE ? en quatre parties - volets un et deux
Extraits
Témoin d’affrontements séculaires, la Kasbah, ensanglantée par un soleil qui s’abîme, conquérante, éperonne l’Océan qui ronge ses fortifications avec la persévérance de celui qui sait qu’il aura le dernier mot. Depuis l’aube des temps, il façonne, efface, remodèle sans cesse les rivages, la terre est son bien, il en est le Maître et imposera toujours sa loi aux hommes……………………
Ce Titan ravage, remodèle broie, désagrège, polit tout ce qui tombe dans ses replis et dans son ventre, digère la matière……………Ses déferlantes se marient aux eaux paresseuses du fleuve qui tache de brun son azur, mais à la marée, remontant son cours, il salinise ses eaux. Lequel sortira vainqueur de l’affrontement qu’ils se livrent depuis l’aube des temps ?

L’un, fougueux, capricieux, indolent, a, pendant des millénaires, fait bénéficier les hommes des ses inlassables efforts en leur offrant des limons nourriciers arrachés de haute lutte à la montagne.
L’autre, le Géniteur, prêt à tout donner mais aussi à tout reprendre. Sa phénoménale puissance de vie ou de mort pèsera lourd sur le sort des hommes………………………
L’un, né de si peu, mais opiniâtre………… arrache, roule, balafre profondément la nature, use tout ce qui est un obstacle à son flux dévorant…………….
L' L'éternité est à lui !

Il prend son temps, jabote d’écueil en écueil, enneige les roches, se joue des creux et des bosses, rogne la terre jusqu’à y être confortablement installé et en artiste façonne la nature, créant de magnifiques paysages…………….. Les jours de colère fulgurante, capable du pire, il broie tout ce qui lui résiste de la nature et des hommes et abandonne sur ses rives leurs corps gonflés, comme baudruches……………………….
Il a tout connu depuis le commencement, sa destinée est capricieuse : il sait se faire discret ou disparaître aux yeux des humains pour rouler ses flots sous terre, abandonner son lit pour un autre, ou encore se perdre à tout jamais………………

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À subir tant de millénaires, à voir tant d’espèces se succéder, une certaine lassitude l’avait envahi, mais dès lors que sur la planète était apparu l’HOMME, il n’avait plus connu l’ennui : que de temps ne lui avait-il pas fallu pour sortir de sa torpeur, et quand son esprit s’était ouvert éveillant son intelligence, il avait pressenti qu’à jamais elle les séparerait et causerait sa perte……………..
Dès lors, lui, l’infatigable paysagiste, sut, que celui dont il s’était épris et auquel il avait tant donné, gangrènerait sa planète…………………..
Dans la plaine où il paresse, sa fougue passée, il prend son temps et se souvient d’époques où des hordes barbares s’affrontaient pour imposer leur suprématie, toutes, opiniâtres dans leur détermination à conserver quel qu’en fut le prix la terre conquise : des hommes à l’aube de leur nation !............................. Dans ces affrontements guerriers, il se retrouvait : jeune, insolent, prêt à tout pour affermir sa puissance, lui, né de si peu…………Chaque époque portait son sceau, il avait connu la rudesse de mœurs de chacune, avait souffert des excès et des lutes fratricides que se livraient sans merci les hommes. Toutefois, il avait été surpris que ces mêmes hommes aux appétits de puissance toujours inassouvis dont la furie, la haine, les faisaient se détruire fussent aussi capables d’aimer. Ses torrents avaient nourri l’âme tourmentée de poètes exaltés et féconds, d’autres apaisés par ses eaux assagies et ses rives ombragées, propices à la réflexion, écriront des stances qui demeureront immortelles. Sa récompense : les suivre jour après jour, au fil des saisons. Son état eût été différent, leurs confidences l’eussent fait pleurer.

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Pour l’infatigable raboteur de montagnes, le repos que s’accordaient les hommes restera une énigme. Il se souvient époques lointaines quand s’égayaient sur ses berges et passaient de longues heures à contempler la nature…………………….
Pendant des siècles les femmes avaient battu leurs linges sur les pierres de ses berges, aucune ne s’était doutée dd son plaisir quand elles rafraîchissaient leur poitrine en sueur, se miraient dans ses eaux, s’aspergeaient les unes les autres en riant et que le vent les troussait dévoilant leurs croupes: chaque goutte qui les atteignait c’était lui………………… Puis un jour, elles avaient disparu.
S’il avait connu sa destinée, il aurait contraint les hommes à fuir……………. Pourtant, au font de sa mémoire inaltérée, il leur conservait une certaine tendresse en dépit de ses outrances, engendrées par son génie. C’est lui qui avait brisé l’élan qui l’amenait à rencontrer l’Océan. C’est lui qui l’avait contraint à des eaux dormantes.………………… C’est par sa faute, que ses eaux véhiculeront plus que la mort……………………..

Des hommes succéderont à d’autres hommes qui jamais ne verront l’aboutissement de ses travaux, et lui qui avait tant à faire, les contraindra à se tourner vers L’OCÉAN qui leur refusera son salut!............



"LES AMANDIERS"
Chapitre 20
Extraits
………….. Avant que ne s'éteigne la chevelure d’Hélios, que les ténèbres n'effacent le jour, à l’heure crépusculaire où sur la terre ondulée caracole le Cri, les ouvriers avaient regagné leurs khaïmas. C'est avant que la nuit n'apporte son cortège de sortilèges, que ne s’éveillent les chouettes, ne rodent les chacals, ne s’élèvent les plaintes lancinantes des chiens sauvages, et ne dansent les jnouns (esprits malins) qui jouent avec l’âme des vivants, qu'ils osaient, regroupés autour des feux, parler de ce qui les effrayait tant ; sous le joug de peurs ancestrales les femmes engourdissaient leurs angoisses en se disant qu’Allah, qui ne laisse rien au hasard impose à chacun sa destinée ! ………………
………………Paul avait acheté une concession dans une région sauvage loin de tout ……….Il lui fallait deux bonnes heures pour parcourir les soixante kilomètres, d’un ancien tracé chamelier qui entre parois abruptes et précipices enroulait les collines comme le serpent sa branche……… Un jour croyant gagner quelques kilomètres il avait pris un raccourci et y était tombé en panne…….. Après une heure d’une marche harassante, dansant dans l’air chaud une vaste demeure lui était apparue…….. Sur l’un des piliers on pouvait encore lire : "Les Amandiers" ! L’endroit semblait dessert et abandonné. Après avoir traversé un jardin en friche il avait accédé à une véranda délabrée envahie par la végétation, en voulant atteindre la cloche défendue par l’épais feuillu il s’était égratigné la main. Après plusieurs tentatives la porte s’était entrouverte……… un géant et dans son ombre une petite créature le regardaient sans le voir, mal à l’aise il ne savait quelle attitude adopter……… Cependant que chacun s’observait une étrange histoire surgit des brumes de sa mémoire, où l’avait-il entendue ?........... à travers la broussaille de la crinière de feu qui en mèches retombait sur son front, il sentait tout le poids d’un regard et sur le visage envahi par une épaisse barbe il ne pouvait rien lire, seules les mains étaient expressives, particulièrement soignées elles détonnaient. Quant à la femme, elle était aussi petite que l’homme était grand, aussi menue qu’il était fort, aussi frêle qu’il était robuste, sa peau brûlée par le soleil, flétrie, ratatinée faisait oublier qu’à une époque elle avait sans doute été jolie, mais il n’en restait rien, dans ce visage atone ravagé par les rides, de grands yeux inquisiteurs vous transperçaient. Paul, piqué par la curiosité était bien décidé à arracher quelques mots à ce couple si mal assorti……………. ……………….Depuis cet incident quand il descendait se réapprovisionner, Paul avait pris l’habitude de ramener à ses lointains voisins des denrées dont ils préféraient se passer plutôt que d’avoir à quitter leur domaine ……………… ………….…….La ville : quelques boutiques indigènes en dur, un souk une fois par semaine, et surtout, l’unique café : "Chez Dimitri" , où se retrouvaient tous les camionneurs, forestiers, exploitants de la région, les nouvelles qu’ils se jetaient entre un casse-croûte et un verre de vin circulaient à grande vitesse…………….. L’homme avait débarqué dans le pays avec pour tout bagage une vieille valise et ses économies cachées dans ses chaussettes. Comme il n’avait pu, faute de moyens suffisants, acquérir dans la capitale le commerce dont il rêvait, il avait atterri dans ce trou……….. Personne ne savait d’où il venait - à cette époque les gens évitaient d’être trop curieux avec les nouveaux arrivants - c’est le temps qui dévoilait les secrets ! Toutefois, son nom portait à croire qu’il était grec…………… Chaque jour il achetait ses denrées chez les indigènes et si les légumes flirtaient avec la fraîcheur du matin, celle de la viande dépendait de l’heure à laquelle on la négociait : plus la journée été avancée, plus on pouvait en discuter le prix et Dimitri s’y entendait pour les faire baisser. Sa pingrerie l’obligeait à n’accorder aucune confiance à son personnel, aussi présidait-il aux destinées culinaires mais comme il n’avait aucun talent pour cette discipline, il servait à ses clients des mets indéfinissables……………………….. ……………Pour accéder à la grande maison aux volets mi-clos comme des paupières lourdes, Paul traversait les vestiges d’un jardin embroussaillé de hautes herbes calcinées leurs graines émiettées sur la véranda à l’abandon, s’enracinaient dans la terre qui s’y était accumulée pour former des touffes éparses qui avaient raison du carrelage……………. Le rituel ne changeait guère : abonné au thé, Paul n’osait demander du café à ses hôtes persuadés que cette boisson avait sa préférence. Si tous trois parlaient à bâtons rompus, ni Georges ni Martha ne faisaient allusion à leur vie d’avant……………….alors que Paul allait demander le nom du pianiste du concerto de Brahms que Martha, détendue et semblait-il heureuse, venait de mettre sur le plateau d’un vieux gramophone poussif au ressort capricieux qu’il fallait sans cesse remonter la foudre s’était s’abattue dans un hurlement d’une puissance inouïe. Paul avait si violemment sursauté que sa tasse lui avait échappé, il avait senti ses cheveux se dresser sur sa tête comme le jour où la foudre en boule avait traversé sa chambre. Georges n’avait pas bronché mais sa femme dans sa précipitation à quitter la pièce avait entraîné la déserte. Une chape de plomb était tombée !.................... ………………Dans la cabine de son camion qui ronronnait comme un gros chat Paul se sentait en sécurité, sur le ciel en fusion les amandiers défilaient qui lui paraissaient hostiles, au mépris de toute prudence il fuyait pour ne plus entendre le Cri, et quand une silhouette, probablement celle d’un animal, avait surgi, il avait manqué verser dans le ravin. Dans la lueur des phares la piste révélait son vrai visage : elle n’était que danger………………….
………………Depuis longtemps Paul avait vendu sa concession et refait sa vie dans la ville blanche, quand, par hasard, il avait appris que "Les Amandiers" était à vendre mais ne trouvait pas preneur…………………
MELLAH
Chapitre 17
Extraits
Un soleil à faire pleurer les pierres écrasait la ville blanche, jadis victorieux ou défaits, ses remparts, orgueilleux encore, n’arrêtaient plus que les vents de sable qui sous la cinglante morsure de milliers de fines parcelles de quartz incisif ne laissaient de ses créneaux que des moignons. La cité, retenait son souffle, sa population chassée des rues par la fournaise………… Engourdie par la chaleur et bercée par le chant des fontaines elle espérait des vapeurs océanes qui montaient à l’assaut de la kasbah une fraîcheur salvatrice.
…………………Le brouillard avait jeté dans les venelles puantes une foule braillarde pressée d’acheter les rebuts des autres quartiers de la cité et ceux qui avaient touché le fond de la misère trouvaient encore dans les rebuts du rebut des trognons et des têtes de poisson putrides qui disparaissaient dans de vieux sacs suants et poisseux……………. Avant que la nuit ne s’installe, ils s’empressaient de regagner leur trou : demain, pas un ne mettrait le nez dehors car tous gardaient en mémoire les pavés rougis du sang mêlé des juifs et des musulmans !

Mellah : cloaque enraciné dans la partie la plus insalubre de la cité, marquée au sceau de la pestilence. Mellah : deux syllabes qui taraudent les chairs et témoignent du labeur dont doivent s’acquitter les juifs enfermés dans le ghetto fangeux dont jamais ils ne franchiront les limites. La communauté paie au prix fort son établissement en terre d’islam Certains, qui on crut échapper à leur condition se sont convertis mais les musulmans s’en méfient qui n’ignorent pas combien leur foi est ancrée : ces apostats rejetés par l’une et l’autre des communautés vivent en marge, ce qui ajoute à leur dénuement……………… Dans ce vivier la mort puise sans retenue : les incessantes guérillas qui endeuillent le pays, les rivalités de palais qui éradiquent des lignées entières, les exactions des sultans pour qui la vie des autres n’est rien, les courtisans qui ont cessé de plaire alimentent son gargantuesque appétit, variable selon son humeur. Quand faucher les armées sur les champs de bataille ne lui suffit pas, elle vomit sur les cadavres abandonnés aux charognards des germes qui infestent les populations, sur les places publiques assiste au spectacle des sabres qui s’en relâche s’abattent sur des épaules coupables ou innocentes………………… Par tombereaux les têtes des suppliciés arrivent au saloir du Mellah où les juifs les attendent ………………
………………….Oublient-ils les prunelles à demi voilées par des paupières ensommeillées, les rictus de haine ou d’épouvante face à la mort qui s’est abattue dans l’éclair froid d’une lame ? Au cours de nuits horrifiques ils subissent les assauts des têtes qui réclament des corps, le souffle glacial de leur haleine pestilentielle les fait suffoquer, des mains les agrippent, lacèrent leurs chairs, les entraînent dans des abysses épineux, au matin leur corps portent les marques des griffures qu’ils se sont infligés………………
Sur les remparts, fichées au bout de piques, les têtes des suppliciés se découpent sur un ciel décoloré, d’autres, pendues à des crocs, encadrent les portes de la cité, leurs sucs en longs filets noirs poisseux goûtent sur les remparts terreux, mouches et guêpes s’y disputent le nectar……………Aux endroits stratégiques, des colonies de corbeaux prospèrent……………….Dans des battements d’ailes frénétiques, ils s’abattent lacérant de leurs pattes griffues les têtes, arrachant de leurs puissants becs des lambeaux de peau racornie qu’ils se disputent en vol, agrippés aux chevelures et aux barbes ils picorent dans l’entrebâillement des paupières les yeux profondément retirés au fond des orbites : les crânes privés de leurs chairs deviennent anonymes. Que reste-t-il des guerriers, des courtisans tombés en disgrâce qui dans l’éclair froid d’une lame malgré leurs richesses, n’ont pu acheter leur vie ? : rien ! Quand tout a basculé la mort n’a pas exigé plus des uns que des autres !....................................
………………………Madeleine avait un projet fou dont elle s’était gardée d’informer son mari, seule sa veille bonne, une berbère blanchie sous le harnais avait été mise dans la confidence, horrifiée cette dernière qui se serait passé de cette marque de confiance lui avait dit qu’il ne fallait pas compter sur elle mais Madeleine qui avait de la suite dans les idées l’avait soudoyée………………
- Madame… tu ne dois faire ça !...
- Et pourquoi donc ?...
- Ça porte malheur et tu risques ta vie !
- Je ne crois pas à ces balivernes…Un jour je témoignerai, quand elles seront interdites, que cela à existé !... Comme on dit chez vous…Mektoub !...............................................







***En 1956 il obtient la coupe du plus jeune réalisateur au Festival du Cinéma Amateur de Tanger.En 1961 il entre à la SACD en tant qu'auteur dramatique, parolier auteur compositeur interprète de chansons.Après des études supérieures, il devient Directeur artistique de l'O.R.T.F à Cayenne en Guyane Française. Il y expose ses sculptures sur bois et sur pierre.En 1969 retour au Maroc : il est Producteur, réalisateur à la RTM à Rabat et journaliste à Maroc Soir.*** arrêt sur image





Le GARDE-CHAMPÊTRE
Nouvelle - 1999 Dans les années cinquante de notre siècle agonisant vivotait sereinement la tranquille commune de Cuers, dans le département du Var.

Anaxagore Escartefigue y occupait les fonctions, ô combien chargées de responsabilités aussi diverses que délicates, de garde champêtre.
Garde champêtre, chez les Escartefigue, on l’était de père en fils ou, tout au moins, depuis celle qui avait vu les épousailles de Basile Escartefigue, sous le règne de Napoléon III, avec une belle jeune femme grecque venue chercher bonheur et fortune dans cette France et sur cette côte jadis colonisée par ses ancêtres de Phocée. Depuis cette union, toute la descendance Escartefigue avait coutume de baptiser ses rejetons de prénoms helléniques
Anaxagore, donc, « garde champêtrisait » sur le territoire de Cuers, battant la campagne, mais aussi le tambour pour les « Avisss…à la population !… », et faisait office de « constable », son homologue britannique, intervenant lorsque de menus larcins de foire, de poulailler ou autres différends de bornage entre paysans pouvaient trouver une paisible issue sans l’intervention des autorités policières.
C’était un bon vivant, aussi jovial que joufflu, aimant le bon manger et le bien boire, les croupes et les poitrines accueillantes, la sieste et les « pieds tanqués » à l’ombre des platanes quand souffle le vent d’Afrique et crissent les cigales dans les ramures résineuses.
Outre son métier, qu’il accomplissait avec amour et constance, Anaxagore avait une passion : l’archéologie.
Comme la plupart des autodidactes, il avait acquis en cette matière des connaissances théoriques, certes, mais fondées aussi sur l’expérience, et qui eussent confondu bien de prétendus professionnels appointés par nos impôts.
Cette passion était complémentaire de ses activités officielles. A force de battre les fourrés de sa canne au fil des kilomètres que sa fonction lui imposait de parcourir chaque jour, son œil, attentif aux ébats des lézards et aux ribouldingues des mulots, avait fini par remarquer des anomalies dans la configuration de certains champs ou de prés dont il avait la garde. De ses connaissances retenues de la lecture des quelques livres de la bibliothèque municipale traitant des « choses de l’ancien temps », il lui revenait, en parcourant certains sites, le souvenir confus de photographies des restes de monuments, d’habitations antiques, romaines ou grecques…


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LA FIGUE Piécette en un acte
ce divertissement devait être représenté à Solliès-Ponty dans le cadre de la
"FÊTE DE LA FIGUE"
Extrait
Escartefigue - A la fin li pous s'agouton ! … Et pourtant, ce matin, à l'aurore …Rouge de matin , la plueio es en camin!…On ne peut plus se fier à personne, pas même au Bon Dieu!…Oh! pardon Seigneur!… Cette chaleur me rend fada! (Il consulte son oignon) - Bientôt midi et ce bon à rien de Pastagnol qui n'arrive pas!… Les portables, je me demande vraiment à quoi ça sert! (Il brandit son portable, appuie rageusement au hasard sur les touches de l'appareil avant de l'appliquer en maugréant à son oreille et aller le jeter dans le puits) Je l'ai appelé à huit heures de cette maudite matinée pour lui dire que j'étais en panne de tracteur!..Je l'ai rappelé deux fois depuis!..Pas de réponse!…Et moi, pendant ce temps, j'agonise en plein cagnard!… Pauvre de moi! …Pauvre de moi!…Je suis bon pour passer la nuit ici, sur cette restanque, le dos déchiqueté par les cailloux pointus, le ventre gelé par le Mistral…A la météo ils ont dit:" Mistral léger"…Il n'y a pas de Mistral léger, Messieurs les savants, il n' y a que le Mistral tout-court, celui qui vous gèle les tripes et les poumons, ou vous attise les étincelles pour incendier vos bois et votre cœur!:…Pastagnol, si je survis à tout cela, je te punirai à jamais de cette mortelle trahison en te privant de mes figues pour au moins vingt ans…Ou bien dix ans…C'est un bon mécanicien…Mettons une saison. C'est sans appel et tu t'en tires bien…Et si tu viens me dépanner d'ici une heure, on n'en parlera plus…Mais par pitié, dépêche-toi! …Je ne peux pas passer la nuit ici, à la belle-étoile!… ( Apparait le petit Prince ) Petit Prince - Quelle étoile ? Escartefigue - Allons bon !…D'où sort-il celui-là? Je ne l'ai pas vu arriver…Qui es-tu, petit ? Qu'est-ce que tu fais là ? P.Prince - Tu parlais d'une étoile, Monsieur. Laquelle? La mienne, peut-être, celle de mon système? Celle autour de laquelle tourne ma planète?… Escartefigue - Etoile ?…Système?…Planète?…Ces minots, tout de même, on se demande vraiment où ils vont chercher… P.Prince (L'interrompant) - Monsieur, s'il-vous-plait, dessine-moi une figue! Escartefigue - Alors là!…Alors là!…Je ne me sens pas très bien, vraiment pas bien du tout!…(Il va vers la jarre, y trempe son mouchoir dont il se tamponne le front) Et pourtant…Si, je me sens bien…Bon!… Comment ils disent les minots?…Cool!…C'est ça: cool!…Je ne sais pas ce que ça veut dire mais ça calme…Cool!… A présent, voyons: ce gamin, il est bien devant moi et il me parle…Il est bizarrement accoutré : un manteau à revers, des bottes… par cette chaleur!…Et une épée!…Il porte une épée à la ceinture! Petit Prince - Monsieur, j'insiste: s'il te plaît, je te prie de me dessiner une figue!
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